• Aujourd’hui, nos villages ont été vidés de leur sève vivifiante. En effet, suite à cette crise généralisée qui sévit au pays, l’amplification du phénomène de l’exode  rural peut être considéré comme l’un des facteurs négatifs de l’après indépendance, car à notre époque, il existait dans nos villages des hommes très puissants qui pouvaient rivaliser d’ardeur avec leurs frères installés en milieux urbains. Ne soyez pas étonné qu’au sein de certains villages, on avait connu des « Richards » ou « Mvuama za Nzimbu », ces villageois qui ont battit leur fortune à partir de leurs villages respectifs avant d’émigrer et s’installer à Kinshasa où ils ont fait fructifier leur fortune.

    Nkaka Bilula et Jules Mpanzu du village Mbamba

    Nkaka Kuiti du village Kinlele,

    Nkaka Zeka du village Zamba,

    Ce sont quelques exemples types de ces hommes qui connu leur réussite sociale, à partir de leurs villages respectifs, et qui ont plus tard investit solidement en milieux urbains.

    Je termine ce chapitre réservé aux « évolués » de notre époque  en ouvrant une parenthèse pour parler spécialement du rang social assez élevé de mon grand père maternel, Nkaka Jean Dekoke, fils aîné de Mfumu Kautako Ngyadi. Celui-ci était au propre comme au figuré un villageois. Mais, il fut un villageois pas comme les autres, car nous pouvons affirmer qu'il fut un "Monsieur", un vrai gentleman. Certes, il avait travaillé quelques années comme aiguilleur des trains dans la société des chemins de fers Matadi – Kinshasa, mais c’est dans les activités agricoles qu’il doit sa réussite et son envolée. Encadré par les services techniques de l’INERA de M’vuazi, il fut le premier indigène qui s’était lancé dans l’élevage des bœufs dans la contrée de Nkolo. Ses grandes bananeraies, ses caféiers, ses grandes plantations des haricots, firent de lui un homme très fortuné qui n’avait rien à envier aux citadins. A ce titre, on peut le citer parmi les villageois évolués, car sa maison construite au village dans les années 50, est encore debout. Les services d'appoint de l’INERA ayant apporté leur expertise dans la construction de ce bijou qui fut un des cadres de repos des agents expatriés affectés dans cette station,  lors de leurs escapades dans les villages environnants. Nkaka Jean Dekoke n'est qu'un exemple parmi mille. Quiconque connait un autre cas de réussite sociale villageoise assez remarquable de cette époque-là,  peut nous en parler. 


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  • Passons maintenant aux enseignants qui furent les premiers intellectuels au Congo Belge. C’est à eux que revenait la lourde charge d’aider et d’encadrer les missionnaires et les administrateurs coloniaux dans leur mission d’évangélisation et d’éducation civique et morale de la population. A ce titre, les moniteurs occupaient une place privilégiée dans la société. Ne soyez pas étonné que ces derniers soient choyés par l'adminstration coloniale. Si les grands commis de l'Etat précédemment cités ont bénéficié des largesses de l’Etat, les enseignants étaient aussi soignés aux petits oignons. Leurs salaires étaient en rapport avec le métier qu’ils exerçaient. Lorsque l’Etat instaura la politique d’octroi des crédits des maisons dites «Fonds d’avances », les moniteurs furent nombreux parmi les bénéficiaires. Suivez notre regard ! Maître Nsokele (le premier Directeur congolais à l’Ecole Primaire Sainte Thérèse), Maître Makanzu, Maître Douens (Kimbungu), Maître Diakota, Maître Gabriel Bimponda, Maître Emmanuel Kiala, Maître Alphonse Fuauna,  Maître François Nzunda, Maître Pascal Mayembe, Maître Antoine Mpembele, Maître Jérôme, Maître Kufulu, Maître Nkukabana, Maître Munzembo, Maître Nkunga Yvon, Maître Gérard Dokelo, Maître François Masamba plus connu sous le nom de Maître Méthode, Maître Médard, Maître Théophile Mangituka alias Maître Train, Maître Aimé, Maître Félix Bikumunu, Maître Bikawa, Maître Kuhuna, Maître Sumika, sans omettre quelques enseignantes très connues dans  les rues de notre cité et qui prestaient  à l’école Notre Dame, notamment  Monitrice Nkuba, Lukula et Nkembi Elisabeth, etc…. Retenons aussi dans cette liste Maman Bernadette, Directrice au Foyer Social. Ku Mviloti, nous nous souvenons de Maître Mabilama, de Maître Nsumbu, Maître Levy et autres Maître Remy.  


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  • Ils étaient nombreux les jeunes congolais qui avaient rejoint Mfumu Nsumbu et Emmanuel Lubalu dans les services de l’Etat. Mais, vu notre jeune âge, nous ne pouvons parler que de ceux que nous avions connu. Ainsi, nous allons  nous limiter à : Papa Jean Dinnard, Papa Ndofula, Papa Pascal Nsoko,, Papa Wingi Pascal Baylon (qui deviendra président de l’ABAKO, section Thysville), Papa Mvuti Joseph, Papa Baruti, Papa Jules Fernand, Assistant Tshibuabua, Assistant Difuidi, Assistant Lunkoka, Assistant Makonko, Papa Pierre Lukoki, Papa Pembe, Papa Bernard Mpununu,  Papa Werry, Papa Lima Joseph, Papa Edouard Mayemba à l’Hôpital Président Charles et Papa Kunantu D’Aquin.Avec eux, nous avions également connu Papa Matula,  Papa Pierre Kuyula, Papa Mandiangu, Papa Sindani, Papa Lubasa, Papa André Sela et Papa André Swana, tous assistants agricoles. C’est eux qui ont vulgarisé les jardins et les étangs tout le long de la vallée de Ndimba Leta. Juste à côté du stade Offitra, sur l’avenue Bambala, il y avait quelques maisons de l’Etat où étaient logés quelques agents de l’Etat tels que Papa Matingu, greffier au parquet, Papa Pierre Munseke, alias Ministre de l’Information (Yani wa ba kotesenge, yani mpe wa ba tukisingi), sans oublier Papa Dinalu Jean qui résidait dans  ce quartier avant sa mutation à Boma.

      

    A l’Otraco, la population  ne resta  pas en marge de ce phénomène des évolués, car même pour ceux qui résidaient au Camp Otraco, il y avait une cité à part où étaient logés les travailleurs indigènes les plus méritants. Konso Simbi kia sansukila ku Camp Albert Thys de l’Otraco, lenda kuani ku tu fula ku makutu, mpasi tua zaya keti ba nani bakala ku ntuala. Sachez aussi que Thysville, ayant abrité durant plusieurs années le siège de la société des chemins de fers Matadi - Kinshasa, il y avait certainement quelques congolais bien placés qui occupaient dans la hiérarchie des fonctions importantes au sein de cette entreprise. De ce fait, ils appartenaient à cette catégorie des agents intermédiaires ...
    Papa Joseph Matuawana, Papa Joseph Mayukua, Papa Muayi, Papa Clément Lubaki, Papa Majalas, Papa Joseph dit Jocol et Papa Léonard Nsingani, le papa de notre aîné Mansevani, sont de ceux-là.
    N’oubliez pas dans les années 60, cette forte influence exercée d’une part par Mfumu Mukoko qui passait pour le chef de file des Ndibu à l’atelier central et d’autre part Papa Madiamba, une forte gueule qui encadrait tous les  Mintandu minderi. Ces deux fortes personnalités étaient obligées au gré des vagues de cohabiter et d’encadrer leurs ouailles respectives, même s’il se racontait à l’époque que Mfinda mosi ka yi yadiluanga kua Ngo zi zole ko. Dans la foulée, il y avait aussi quelques figures de proue comme Papa Camille Makela, Papa Samuel Kintaudi (Chef de Gare au Bloc 36), Mbuta Célestin Mayayila, etc…

    Nous demandons à notre aîné Célestin Mansevani, au cas où il va nous lire, de nous aider à compléter cette liste, car ayant été d'une promotion antérieure à la nôtre, il peut certainement nous assister en nous rappelant certains noms qui nous ont échappé.
     


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  • Ce sont les rares indigènes qui savaient soit tenir le bic (stylo) et de ce fait furent les premiers collaborateurs des mindele qu’ils ont servi soit, dans les services de l’administration publique coloniale, parfois  en qualité de « Kapita » ou chef d’équipe au sein de la société des chemins de fers. Ces papa-là étaient en avance sur leur temps, car ils remplissaient avec brio, différentes tâches administratives ou techniques qui leur furent confiées et encadraient correctement les travailleurs mis à leur disposition.

    En 1922, Papa Pierre  Nsumbu du village Kidezo de Nkolo fut le tout  premier Commis indigène affecté au bureau de l’Administrateur du Territoire de Thysville. Il a exercé ses fonctions de 1922 à 1937, année de sa disparition trop précoce. Papa Nsumbu était le propre grand frère de Papa Camille Wazolao, alias Ndibu a Ngolo que Crispin et moi, avions connu à l’Athénée Officiel de Thysville où il fut notre Assistant médical.  Toutefois, c’est un originaire de Mbanza Manteke, Monsieur Mawolola Lundoloka qui eut le bonheur de travailler comme premier greffier noir au Tribunal extra-coutumier de Thysville. En 1925, Nkaka Emmanuel Lubalu, une autre légende de Nkolo, fils du Chef médaillé Kautako Ngyadi rejoignit Tata Nsumbu. Deux années plus tard (1927), c’est son petit frère Nkaka Jules Benga, un autre fils de Mfumu Kautako qui viendra renforcer leur équipe. Le simple fait de travailler à côté des blancs, conférait à ces Messieurs, un statut déjà spécial. Ce respect les a accompagnés jusqu’à la fin de leurs vies.

    Mfumu Tintika, est le premier Chef du centre extra-coutumier de Thysville. Mais, l’homme qui a le plus marqué de son empreinte indélébile son passage à la tête de ce service restera sans conteste Mfumu Augustin Kinzonzi, son successeur. C’est l’un des premiers immatriculés de Thysville. Il est  décédé en 1955. Le jour du transfert de sa dépouille mortelle dans le manianga fut déclarée férié et chômé sur toute la ville de Thysville. Un long cortège accompagna le corps jusqu’en ville à la station Fina pour un dernier au revoir à celui qui incarnait l’autorité dans cette cité. Lorsqu’on se place dans le contexte de la vie à l’époque coloniale, on se rend parfaitement compte de l’influence que celui-ci avait dans sa ville. Il fut difficilement remplacé à la tête de la cité après d’interminables tractations par Mfumu Lutete Paulin, un ancien assistant médical que les notables Ndibu (Papa Ntela, Papa Kimbamba, Papa Ndongala Gracia, Papa Adolphe Ndualu) allèrent chercher à Cattier où il prestait à l’hôpital de l’Otraco.

    Dans cette liste des hors cadres, il faut citer aussi le grand garagiste Ali Sidi et sa sœur Ma Ndundu (épouse de l’Assistant médical Ntunkadi). A propos de Papa Ali Sidi qui exploitait aussi le dancing Mutuel Bar, les mauvaises langues disaient de lui, qu’il était un agent au service de la sureté belge. Ceci expliquant cela, sur instigation des anciens de l’ABAKO, un embargo fut décrété sur son bar qui fut obligé de fermer ses portes, faute des clients.

    Avec lui, il y avait d’abord Papa Jean Dibua qui exploitait, un autre dancing de grande renommée, « Congo Bar » sur l’avenue Léopold, puis le duo Jules Benga et Kiamana qui avaient ouvert le dancing Kiakia Bar que les anciens de Thysville désignaient sous le nom de Paris  Soir de Thysville.

    Nous ne pouvons pas terminer cette liste, sans faire allusion à ces personnalités de très grande notoriété qui œuvraient  à côté des missionnaires (catholiques et protestants). Qui n’a pas connu Papa François Mbaki et Mfumu Zingi à la paroisse Sainte Thérèse ou Pierre Nkezi au Couvent des Sœurs Notre Dame ? De même que le nom de Papa Emile Disengomoka résonne encore dans les cœurs de tous les habitués de la paroisse protestante de Mviloti. Qui peut nous contredire ou dire mieux ?


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  • Au moment où je prends mon avion pour me rendre en vacances à Thysville, je lance un autre débat sur les familles dites « évolués » de Thysville, ainsi que leur particularité par rapport aux autres habitants de notre cité. Le terme Evolués tel que nous allons l’aborder dans ce feuillet risque de prêter confusion dans les esprits, car si on se réfère aux pratiques de notre période d’enfance, la plupart des personnes que nous allons citer dans ces lignes n’avaient pas cette qualité. En réalité, ils étaient à compter du bout des doigts ces congolais que les blancs considéraient comme « évolués » et à qui ils attribuaient la fameuse carte d’immatriculation, pour avoir réussi leur pleine intégration sociale dans le mode de vie européen. Ce n’est pas n’importe qui pouvait accéder à ce rang. Seuls quelques privilégiés furent acceptés dans ce cercle fermé. Si les bribes d’informations en notre possession sont exactes, seuls Mfumu Augustin Kinzonzi, Emile Disengomoka, Papa François Mbaki, Pierre Nkezi, Ali Sidi et Jules Benga avaient ce statut. Quiconque détiendrait des informations sur ce sujet peut nous en parler. Le débat est ouvert. Cela n’empêche que certains congolais, tout en restant des collaborateurs directs des mindele, furent versés dans le même panier à crabes des citoyens ordinaires. Toutefois, comme vous allez le remarquer dans notre énumération, ces personnes que nous allons vous présenter ont en commun, cette notoriété acquise par leur envergure au plan interne et d’avoir été accepté, notamment à bénéficier de l’appui des autorités dans la modernisation de leurs habitations avec l’octroi pour certains, des crédits dits Fonds d’avance. Ainsi, dans notre démarche, nous avons plutôt établi avec Crispin Lukoki « Simbi kia Nkulu » , une liste non exhaustive des têtes couronnées à Thysville que nous avons classifié en quatre catégories. Dans le premier lot, nous citerons les Hors cadre, c'est-à-dire, ces personnes, toutes catégories confondues réunissant l’unanimité autour de leurs noms grâce à leur rayonnement et leur grande influence dans la cité. Aimés ou détestés par leurs contemporains, ces Messieurs méritaient le respect de leurs concitoyens qui les traitaient avec les égards dus à leur rang. C’étaient des privilégiés dans une société basée sur le respect de l’autorité établie et de la loi incarnée par le pouvoir colonial. Une deuxième catégorie sera constituée des Kalaka. Les Clercs ou Commis de l’Etat, ceux-là même qui à divers échelons de l’administration coloniale exerçaient diverses fonctions, allant des plantons aux auxiliaires de l’administration publique. Dans cette énumération, les moniteurs, les assistants médicaux et assistants agricoles occupent une place de choix. Enfin, nous allons terminer notre liste avec les premiers artisans installés pour leur propre compte à Thysville et ceux qui ont pu émerger à partir de leurs villages natals. Je promets à tous les Bisimbi bia Mpa que je vais mettre à profit mon prochain séjour à Mbanza Ngungu pour m’entretenir avec Mbuta Matuta Mariano, Mbuta Simon Vingadio, Vieux Barabas et autres Ketpit alias Pierre Nkezi Fils, les rares rescapés de cette belle époque qui peuvent nous décrire pendant qu’il est encore temps, l’histoire de notre cité.


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