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    OUVERTURE DU BAL DES GENEREUX DONATEURS

     

    Avec les élections qui profilent à l’horizon, tous les cordons de la bourse des personnalités politiques de notre contrée vont se délier au profit de leurs électeurs. Même ceux de nos compatriotes fichés comme les plus radins de la ville vont s’illustrer dans des actions de prestige, pour soigner et tenter de rehausser leur côte d’amour dans les cœurs de nos populations. Mais avant de poursuivre cette analyse, je vais me permettre de vous faire un récit que d’aucuns trouveront banal, mais qui est à mon avis très significatif pour ceux qui l’avaient vécu et qui conditionne parfois certains comportements dans les milieux les plus défavorisés de notre société.

      

    L’histoire réelle à laquelle nous allons faire allusion date de la période de grandeur du MPR-Parti Etat. A l’issue des élections organisées si je ne me trompe pas en 1982 pour la désignation des Commissaires Politiques, plusieurs électeurs ngunguois qui considéraient le Vieux Kis comme une personne trop envahissante dans la gestion de leurs affaires quotidiennes décidèrent de ne plus voter en sa faveur et jetèrent leur dévolu, sur un certain Monsieur X. Pour des raisons de commodité, nous nous réservons le droit de ne pas citer le nom de l’intéressé. Candidat de l’espoir et du changement, plusieurs familles attendaient des lendemains beaucoup plus meilleurs et enchanteurs avec leur nouvel élu.

      

    Or, les ngunguois sont connus pour leur versatilité et leurs jugements à l’emporte pièce. En effet, après les moments euphoriques consécutifs à la victoire méritée par ce jeune politicien, vint la difficile période du jugement populaire. Ici, ce ne sont plus les paroles mielleuses qui comptent, mais le peuple rend sa sentence en fonction des actes palpables réalisés, parfois dans des secteurs de la vie où l’on s’y attend le moins. Monsieur X qui n’était pas au parfum des habitudes de ses mandants et ayant oublié d’installer une équipe de relais pour assurer son arrière garde en collectant toutes les informations et rumeurs distillés sur son compte dans la cité se fit prendre au piège, car sans le savoir ses moindres faits et gestes étaient épiés.

      

    Comme tout bon mukongo qui se respecte, chaque fois qu’il était de passage à sa base, dès qu’on lui signalait un cas de décès dans la ville, notre Honorable n’hésitait pas un seul instant de descendre sur le lieu du deuil pour consoler la famille éprouvée. Or, c’est dans ce genre de rassemblement que toutes les langues se délient facilement. Pour votre information et à titre de rappel, dans nos communautés de base, chaque fois qu’il y a un deuil, un cahier de cotisation est ouvert et mis à la disposition du public constitué en grande partie des amis et voisins de la famille éprouvée. Croyant bien faire, notre Honorable remplissait son devoir de manière régulière et satisfaisante selon lui, car il s’arrangeait toujours pour donner un peu plus que les autres cotisants. Mais, il oubliait que dès qu’il tournait le dos du lieu du deuil, les personnes les plus curieuses s’arrangeait pour aller vérifier le montant cotisé et vu sa modicité, on commençait à jaser sur son compte et à le chuchoter en coulisses…

      

    Or, dans les mêmes circonstances de lieux et de temps, si le vieux routier « Etats-Unis » se présentait dans ce même deuil, ce n’est pas vers cette table publique qu’il se dirigerait. Il chercherait plutôt à rencontrer en aparté dans le salon de sa résidence, le Chef de la famille éprouvée. Et les ngunguois, très curieux et perspicaces en la matière savaient interpréter dans les signes du temps. A la fin de cet aparté, lorsque le maître des céans raccompagnait son hôte avec un petit sourire au coin de la bouche, tout le monde savait déjà que fidèle à sa légende, le Vieux Kis n’y était pas allé de main morte.

      

    Voilà le secret de la longévité de Mbuta Kisombe sur la scène politique à Thysville. Plusieurs de ces fervents supporters disaient qu’il était toute sa vie en campagne politique. Ce qui devait arriver arriva très vite. Monsieur  X, le nouveau messie fut vomi par la population et n’a pas eu une longue carrière politique, car déjà au mandat suivant, il subit une défaite cuisante, fruit de ses turpitudes et de sa naïveté.

      

    La vie étant un éternel recommencement, nous allons bientôt entrer de plein pied dans une période turbulente où chaque candidat va puiser dans sa propre imagination pour réaliser quelque chose de positive au profit de ces électeurs. Au  menu, ce sont les écoles, les hôpitaux et centres de santé, les équipes de football ou de basket-ball, les catcheurs, les chorales des différentes confessions religieuses, les mamans commerçantes, les agriculteurs, etc… qui seront à l’honneur avec les donations de toutes sortes qui leur seront réservées. Rien n’est plus beau qu’un cadeau qui vient de son cœur et qui est accepté spontanément par le public destinataire. Pour se faire aimer, il faut savoir partager et donner avec son cœur, ne cesse-t-on de nous répéter.

      

    Cette culture des donations qui date de la période faste du régime du Maréchal Mobutu est devenue un mode de vie et de gestion de notre pays. Alors que c’est l’argent du contribuable qu’on utilise pour exécuter certains projets d’urgence et d’autres qui sont pourtant budgétisés, c’est la personne du Chef de l’Etat ou du gouverneur de la province qui est souvent mis en exergue pour louer le projet exécuté. Beaucoup de personnes la pratique et d’autres refusent de s’y frotter, car disent-ils, c’est l’un des fléaux qui pousse la population à la paresse et à l’oisiveté. Quelle est la meilleure position à adopter et quelles sont les dividendes qu’on peut tirer de cette pratique ?

      

    Maintenant que ce sont les poches des individus qui vont être soumis à dure épreuve, nous sommes en droit de nous poser cette question : qui sera le meilleur généreux donateur de la prochaine campagne à Thysville ? 

     


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